mercredi 30 mai 2012

Pommade

Mon monde parallèle est un entrelacs de parkings d'hôpitaux, de couloirs et de salles d'attente. De chambre d'hôpital sinistre aussi. 
C'est tout un art d'y lire. D'en oublier les odeurs, les bruits, les conversations, les regards des uns, les angoisses des autres. 
Se dire qu'à chaque fois qu'on repensera à ce livre, il sera associé à ce monde-là.

Heureusement, jusque là j'avais dans mon sac un livre de fou. Un livre qui t'emporte, un livre qui fait se contorsionner ceux assis sur les mêmes chaises inconfortables que toi, parce qu'ils veulent savoir, pourquoi tu souris, pourquoi tu ris alors que tu es là, dans cet endroit détestable.
Et toi tu te dis que tu as vraiment bien choisi, parce que c'est aussi invraisemblable que ta réalité du moment, parce que c'est une suite d'histoires courtes, tu peux donc sans perdre le fil, faire des pauses ou t'endormir sur cette banquette en cuir comme hier. 

Et parce que c'est à mourir de rire, surtout quand on peut pas blairer les koalas. (Pourquoi? Ah ben il faut le lire pour ça!)



Le koala tueur et autres histoires du bush, Kenneth Cook, éditions du Livre de Poche, traduction Mireille Vignol


lundi 28 mai 2012

S'échapper

La lecture a toujours été mon plaisir. Je lis voracement, avec délectation, avec emportement, je lis naturellement. 
Je lisais, naturellement, jusqu'à ce que ma vie bascule dans un monde parallèle il y a quelques jours.
Les premières heures j'ai cherché l'échappatoire dans un livre toutes les dix minutes. Je ne parvenais pas à me concentrer, la lecture devenait une corvée. J'ai compris qu'il fallait alors que j'aborde les livres d'une autre façon, comme un sacerdoce.
J'y suis, je me force et passe d'un monde à l'autre plusieurs fois par jours. Comme on respire.
"J'aimerais que vous vous souveniez d'un point, c'est que les choses et l'apparence c'est différent."
J'ai traversé le premier livre de 1Q84, l'écriture m'a plu, le reste je ne sais pas encore mais je crois. Il faut que je lise la suite pour en être bien certaine.

1Q84, Haruki Murakami, éditions Belfond, traduction Hélène Morita

lundi 7 mai 2012

Le monde à tes pieds pour deux euros

Tu vois des fois tu attrapes un livre comme ça, parce que tu patientes à la caisse, parce que deux euros c'est pas cher, parce que chez toi c'est compulsif, tu veux des livres dans ta maison, dans ta voiture, dans ton sac, dans ta culotte tu serais même cap s'il le fallait.
Et puis tu te poses à une table de bistrot et en attendant tu feuillettes tes achats. Les choisis, les prévus et celui-là. L'inattendu.
Et quand tu le reposes, ton café est froid, et le livre est lu. En entier. Il n'est pas épais, mais quand même.
Il parle de liberté, d'amitié, mais au fond ce n'est pas ce qui compte.
Ce qui compte, ce sont les mots. Leur magie. Une écriture ensorcelante.
Tu le savais toi que Saint-Exupéry était un sorcier littéraire?

"Il n'est plus d'uniformité. Tout s'oriente. Un silence même n'y ressemble pas à l'autre silence. Il est un silence de la paix quand les tribus sont conciliées, quand le soir ramène sa fraîcheur et qu'il semble que l'on fasse halte, voiles repliées, dans un port tranquille. Il est un silence de midi quand le soleil suspend les pensées et les mouvements. Il est un faux silence, quand le vent du nord a fléchi et que l'apparition d'insectes, arrachés comme du pollen aux oasis de l'intérieur, annonce la tempête d'est porteuse de sable. Il est un silence de complot, quand on connaît, d'une tribu lointaine, qu'elle fermente. Il  est un silence du mystère, quand se nouent entre les Arabes leurs indéchiffrables conciliabules. Il est un silence tendu quand le messager tarde à revenir. Un silence aigu quand, la nuit on retient son souffle pour entendre. Un silence mélancolique, si l'on se souvient de qui l'on aime."


Lettre à un otage, Antoine de Saint-Exupéry, édition Folio
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